Tabac, puff et vapotage : quelles différences ? Quel encadrement ?
Parallèlement, en Australie, le gouvernement souhaite s’attaquer au vapotage de manière générale en restreignant l’achat de cigarettes électroniques à la vente sur ordonnance. Chemin inverse au Royaume-Uni où les autorités de santé encouragent activement les fumeurs à abandonner le tabac pour le vapotage en distribuant des kits gratuitement.
Différents produits, différentes stratégies qui posent la même question : comment réduire le tabagisme ? On fait le point.
Tabac et vapotage : différents produits, différents risques
Les risque du tabac pour la santé ne font plus aucun doute aujourd’hui : avec 75 000 morts, il est la première cause de décès évitables en France et représente 20 % des cas de cancer. Ces chiffres dramatiques ont poussé les autorités et les acteurs de santé à une politique ambitieuse de réduction du tabagisme qui s’appuie sur un ensemble de préconisations regroupées dans le Programme national de lutte contre le tabac (PNLT) : à la fois sur des campagnes de prévention et de motivation (intervention précoce auprès des jeunes, Mois sans tabac) et sur des mesures de régulation de l’accès au produit (hausse du prix, paquet neutre…).
Cette politique porte ces fruits : le tabagisme quotidien concerne aujourd’hui 24 % des Français, contre 29 % en 2016. 33 % des fumeurs quotidiens ont fait une tentative d’arrêt en 2019. La vente des traitements d’aide à l’arrêt du tabac — qui sont maintenant totalement remboursés — est en hausse (+4 % en 2020).
Depuis quelques années, l’arrivée du vapotage dans ce paysage apporte de nombreuses interrogations. En effet, sur le terrain, les professionnels de l’addictologie constatent que de nombreux fumeurs se tournent vers la vape pour réduire voire arrêter leur consommation de tabac : une bonne nouvelle, car vapoter est moins dangereux pour la santé que fumer. Les vaporisateurs personnels ne contiennent ni ne brûlent de tabac, ce qui signifie qu’ils ne produisent pas de monoxyde de carbone ni de goudrons. Le Royal College of Physicians évalue que le vaporisateur personnel dégage 95 % en moins de substances toxiques que le tabac fumé.
Une récente revue de littérature scientifique confirme l’intérêt de la vape pour « augment[er] les taux d’abandon du tabac ».
Le vapotage est-il une porte d’entrée vers le tabac ?
De nombreux acteurs s’interrogent cependant : vapoter mène-t-il vers le tabagisme ? Il n’existe à ce jour pas de données confirmant que la vape a un effet « porte d’entrée » vers le tabac. Il n’empêche que certaines pratiques marketing interrogent, notamment lorsqu’elles ciblent les jeunes.
La dernière étude ESCAPAD de l’OFDT indique que la consommation de tabac chez les jeunes de 17 ans est en très forte baisse en France : en 2022, 47 % avaient expérimenté le tabac contre 59 % en 2017, soit – 12,5 points ! Parallèlement, l’usage de vape progresse bien que les chiffres ne permettent pas de différencier entre vapotage « classique » et puff.
Or les puff, ces cigarettes électroniques jetables, semblent en effet particulièrement questionnables : au-delà de leur impact environnemental important, elles sont facilement accessibles et les fabricants ciblent particulièrement les jeunes.
Quelles régulations pour ces différents produits ?
Le grand écart entre les politiques adoptées en Australie (restriction de la cigarette électronique aux prescriptions médicales) et au Royaume-Uni (distribution de kits de vape aux fumeurs de tabac) illustre toute la difficulté de la prise en compte du vapotage dans la réduction du tabagisme.
L’entrée dans le tabagisme, et donc le public des jeunes, est effectivement cruciale : à ce titre, il convient de rappeler que les produits du vapotage (tout comme ceux du tabac) sont légalement interdits à la vente aux mineurs mais que cette interdiction peine à être appliquée dans les faits. L’interdiction possible de la puff ne devrait donc s’envisager qu’avec des mesures impliquant la restriction de l’accès aux produits pour les jeunes, restriction dont on sait qu’elle est efficace (mais insuffisante) pour réduire les expérimentations.
À ce titre, les « mesures fortes » proposées par le Comité national contre le tabagisme méritent d’être relevées :
- le relèvement de l’âge légal de vente des produits du tabac (par exemple à 21 ans) et l’interdiction de vente de tout produit du tabac aux personnes nées à partir de 2014 ;
- le plafonnement de la rémunération des buralistes liée à la vente de tabac ;
- l’élaboration d’une charte invitant les acteurs économiques à ne pas investir de placements financiers dans le tabac, ni accorder de prêts ou polices d’assurance ;
- l’interdiction du filtre, qui n’a aucun intérêt sanitaire et représente une source majeure de pollution environnementale ;
- une hausse continue des taxes à hauteur de 10% par an.
Parallèlement, le rôle du vapotage dans la réduction du tabagisme — tel que documenté par les professionnels sur le terrain et les études sur la question — plaide pour sa reconnaissance officielle.