Accueillir les femmes consommatrices dans un accueil de jour : rencontre avec L’Arche d’avenirs à Paris
Pouvez-vous nous présenter votre établissement et ses projets ? Accueillez-vous un public de femmes en particulier ?
Zohra Kruithof : L’Arche d’avenirs est un accueil de jour et un espace solidarité et insertion (ESI). ESI est un label parisien, il y en a 16 dans la capitale.
Nous accueillons un public en situation de grande précarité, hommes et femmes, souvent avec un long parcours de rue, des troubles psychiques et/ou des addictions. Nous leur proposons des services de la vie quotidienne : douches, bagagerie, laverie, des salles repos, des casiers pour charger le téléphone, un service de domiciliation administrative. Nous proposons aussi un suivi socio-psychologique, et nous faisons pas mal d’activités : cours de français, visites au musée…
Constance Baud : L’accueil est inconditionnel pour toute personne majeure qui se présente. Nous avons plus d’une centaine de passages par jour avec des gens qui sont là tous les jours et qu’on connaît très bien et d’autres qui sont nouveaux, orientés par le bouche à oreille, par le 115 ou par d’autres partenaires. Il y a aussi des personnes qui fréquentent de manière épisodique.
Zohra Kruithof : 90 % du public est masculin, mais il y a un important groupe de femmes qui vient très régulièrement, notamment pour les douches. Ce sont des femmes avec des parcours différents, des nationalités différentes, c’est un groupe hétérogène.
Constance Baud : Nous avons pensé l’accueil des femmes en leur proposant des espaces de repos et d’hygiène un petit peu en retrait du passage, de manière à ce qu’elles se sentent en sécurité, à proximité des bureaux et des travailleuses sociales.
François Buchsbaum : Dès la création du site en 2011, il a été pensé comme un lieu mixte mais avec une attention portée à l’accueil et aux espaces dédiés pour les femmes. Nous avons une longue expérience et des actions à destination des femmes, autour de la santé, de l’accès aux droits.

Pourquoi avez-vous candidaté au projet Maaa'elles ? Quels sont les objectifs pour votre structure ? Que souhaitez-vous mettre en place ?
Constance Baud : Les addictions au sein du public féminin, avec l’alcool notamment, ainsi que la réduction des risques sont des sujets sur lesquels on réfléchit en équipe depuis plusieurs années et que l’on souhaitait approfondir. En effet, lorsqu’on accueille des femmes, on va d’abord chercher à préserver leur sécurité, travailler autour de leur bien-être, leur proposer une « safe place », mais on ne travaille pas forcément le sujet des addictions et de la réduction des risques alors même qu’une partie d’entre elles est concernée. C’est ce que l’on veut pouvoir faire maintenant de manière plus habituelle grâce au projet Maaa’elles.
François Buchsbaum : Cela coïncide aussi avec l’arrivée de nouveaux professionnels au sein de notre structure : ils ont besoin d’être outillés et de réfléchir avec nous par rapport à la problématique des addictions.
Qu'attendez-vous de l'accompagnement de la FAS et de la Fédération Addiction au cours de ce projet ?
François Buchsbaum : Tout d’abord des outils pour nous aider à mener à bien ces objectifs. Mais aussi des échanges avec d’autres professionnels, notamment moins généralistes et plus spécialisés en addictologie que nous.
Constance Baud : Nous serions curieux par exemple d’en savoir plus sur la pair- aidance : c’est quelque chose qui est assez nouveau pour nous, pour notre secteur des acteurs de jour généralistes, sur lequel on aimerait avoir des retours d’expériences. Nous sommes impatients de commencer le projet et de rencontrer les autres structures qui y participent !
Le projet MAAA’ELLES
Le projet MAAA’ELLES (Mission d’accompagnement et d’accueil – addiction pour elles), dont le premier volet a pris fin en 2023, a mis en lumière un constat préoccupant : les femmes en situation de précarité et confrontées à des addictions sont sous-représentées dans les dispositifs sociaux, particulièrement au sein des accueils de jour. Ces structures, essentielles pour accompagner les publics les plus vulnérables, doivent s’adapter davantage aux besoins spécifiques de ces femmes, souvent confrontées à des violences, des stigmates liés à leur genre et à une grande précarité.
Fortes des enseignements tirés de la première phase du projet, la Fédération Addiction et la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) lancent de la phase 2 de MAAA’ELLES, avec un objectif clair : renforcer l’accompagnement des femmes dans les accueils de jour tout en impliquant, pour la première fois, des maraudes professionnelles.