Tabac : révélateur des inégalités sociales de santé
Les données tabac du BEH publiées par Santé publique France à l’occasion de la journée mondiale du tabac confirment les écarts qui se creusent sur les usages de tabac selon les niveaux de revenu.
En effet, en 2020, la prévalence du tabagisme et du tabagisme quotidien ne varie pas significativement par rapport à 2019. Cependant, parmi le tiers de la population dont les revenus étaient les moins élevés, elle a augmenté de 29,8% à 33,3%.L’augmentation était encore plus nette chez les chômeurs passant de 39.9% en 2018 à 42.7¨% en 2019 et 43.9% en 2020 ! Cette augmentation est essentiellement due à une hausse entre 2019 et début 2020, avant le premier confinement.
Ces données du BEH vont dans le sens des données épidémiologiques que l’Observatoire français des drogues et tendances addictives (OFDT) avait publié après le premier confinement, à savoir une réduction relative des usages chez les usagers non dépendants et un maintien ou une aggravation chez les personnes dépendantes. Comme la grande majorités des personnes qui fument sont dans une problématique de dépendance, les chiffres se stabilisent entre 2019 et 2020.
L’anticipation par rapport au confinement est peut-être due au climat social très lourd, lui-aussi anxiogène, que connaissait notre pays déjà auparavant avec la crise des « gilets jaunes » (sans parler du conflit des retraites…) Le contexte lié à la crise de la COVID 19 particulièrement oppressant notamment pour les catégories populaires est venu encore renforcer le gradient social du tabagisme, également préexistant à la crise sanitaire.
Ces données confirment ainsi notre analyse sur les « syndémies » , c’est à dire une rencontre synergique entre divers mouvements épidémiques, viraux, psychologiques (stress, anxiété) et addictologies surdéterminés par des vulnérabilités psychosociales.
Comme nous l’indiquions déjà en 2019, l’enjeu est de travailler sur les inégalités de santé pour poursuivre la baisse du tabagisme en France. Depuis 2018, nous travaillons notamment avec la Fédération des Acteurs de la solidarité à l’expérimentation d’un protocole d’intervention pour accompagner les publics en situation de précarité sur les questions de tabac, TAPREOSI (tabac et précarité, évaluation opérationnelle d’une stratégie d’intervention). Cet outil sera disponible à l’été.
Nous devons poursuivre la politique ambitieuse menée depuis 5 ans mais la renforcer et l’accentuer sur des publics cibles, combinant des approches de marketing social motivationnel, des approches préventives auprès du public jeunes, des démarches d’allers vers, de réductions des risques en s’appuyant notamment sur la vape, de soin avec l’élargissement de la prescription du patch nicotinique mais aussi le renforcement d’accompagnement pluridisciplinaire par des structures médico-sociales permettant de mieux prendre en compte ces vulnérabilités individuelles.
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