« On souhaite démontrer l’efficacité de la réduction des risques en milieux festifs en Nouvelle-Aquitaine »
Ce travail, soutenu par l'agence régionale de santé (ARS), a abouti à la soumission d'un projet au Fonds de lutte contre les addictions régional, et à la création d’un collectif. Rencontre avec ses deux co-coordinateurs : Tom Puech de l’association Ekinox et Valentin Lacombe de Techno+. Ils nous partagent leur expérience et leurs ambitions pour cette dynamique collective.
Quelles associations sont impliquées dans le projet CAPERMIF ? Comment le projet est-il né ?
Valentin Lacombe – Techno + : Actuellement, le projet CAPERMIF rassemble sept structures : Techno + et Ekinox, le CEID Addictions, l’association Addictions France, le CSAPA La Source – Association Caminante, l’association AIDES en Nouvelle-Aquitaine, et Avenir Santé.
Nous avons commencé à nous réunir et à échanger à l’été 2022, mais le projet financé par l’ARS Nouvelle-Aquitaine via le Fonds de lutte contre les addictions a débuté le 1er octobre 2024.
Tom Puech – Ekinox : À l’origine de ce projet, nous étions plusieurs structures à constater que la Nouvelle-Aquitaine était un territoire très grand et que certains événements n’étaient pas bien couverts, voire pas du tout, par des interventions en réduction des risques (RdR). Nous avons donc souhaité nous rassembler pour mieux coordonner les acteurs.
Il faut savoir qu’en Nouvelle-Aquitaine, il y a énormément de petites structures et d’« électrons libres » qui font de la RdR en milieux festifs. Le but de ce projet-là, c’est de pouvoir les repérer, de prendre contact avec tout le monde et leur donner plus de clés, par exemple pour la fourniture du matériel ou en faisant des formations.
Valentin : Oui, on estime qu’il y a beaucoup plus de RdR que ce que l’on pense sur le territoire ! Par exemple, il y a des bénévoles de Techno + qui, avant de nous rejoindre, mettaient en place des stands de RdR parfois seuls dans les événements, par passion, par volonté d’aider les autres, par volonté d’informer, etc. Donc c’est assez difficilement quantifiable.

Pourquoi ce choix d'un collectif coordonné par deux associations ?
Valentin : Nous en avons beaucoup discuté entre les associations partenaires du projet et il est ressorti qu’une double coordination s’avérait la meilleure idée pour la pérennité du projet et aussi pour sa diversité. Ekinox et Techno + sont des associations assez complémentaires : géographiquement déjà, Ekinox est à Poitiers dans le nord de la région et Techno + est à Bordeaux. Mais aussi du point de vue de nos expertises, avec Ekinox qui assure plutôt la coordination du volet légal du projet CAPERMIF — c’est à dire tout ce qui est concert, festival, soirée étudiante, soirée urbaine, etc. — et Techno +, s’occupe plutôt du volet non déclaré avec les free parties, technivals, multisons… Mais cette répartition reste informelle et on travaille tout le temps ensemble.
Tom : Nos deux associations ont l’habitude de travailler ensemble et la particularité d’intervenir toutes les deux sur du déclaré et du non déclaré, mais avec chacune leurs spécificités et une dominante déclaré pour Ekinox, non déclaré pour Techno +.
Maintenant que le projet est officiellement lancé, quelles sont les premières étapes et les objectifs pour les prochains mois ?
Valentin : Les membres du collectif se réunissent tous les mois, en visio et parfois en présentiel, pour préparer les prochaines actions : le développement de l’identité et de la communication autour du projet (qui sera d’ailleurs bientôt renommé !), l’organisation de formations et la formalisation d’une cartographie des interventions réalisées en 2024.
Tom : Oui, pour l’instant nous faisons de la collecte de données d’une part, et nous travaillons à la structuration de l’organisation interne d’autre part.
Valentin : Fin avril aura lieu notre première formation, interne au collectif, sur la coopération, la gouvernance et la mise en place d’outils et de méthodologies pour mieux travailler ensemble. Une seconde formation aura lieu au deuxième semestre 2025 à destination des intervenants et intervenantes en réduction des risques ainsi que des organisateurs et organisatrices de soirée en Nouvelle-Aquitaine. Elle aura pour thème les problématiques émergentes en réduction des risques et notamment les violences et harcèlements sexistes et sexuels (VHSS) en milieux festifs. Ce sera une formation gratuite et ouverte aux personnes extérieures au collectif. Une autre action, sur du plus long terme, sera d’augmenter le nombre de soirées couvertes par des services de RdR sur les événements festifs de Nouvelle-Aquitaine, que ce soit par l’envoi d’une équipe d’intervenants sur le terrain, de l’envoi de matériel ou de la transmission de connaissances via des formations. Notre objectif est de se donner une identité forte et pérenne afin de devenir petit à petit le hub de la RdR festive en Nouvelle-Aquitaine.
Êtes-vous en relation avec des collectifs similaires dans d’autres régions ?
Valentin : Oui, nous débutons un lien avec le pôle festif Bourgogne-Franche-Comté, qui ressemble au nôtre, pour comprendre comment ils ont fait pour monter leur collectif… qui est un des plus gros de France actuellement. On aimerait échanger avec eux sur la construction des méthodologies de travail, la communication et la mise en place de leur collectif (ils ont un site web, etc.).
Je sais qu’il existe aussi des collectifs similaires en Occitanie, en Ile de France… Avec le projet, nous espérons avoir plus d’échanges avec les autres régions.
Le projet est financé par l'État, qu’est-ce que cela représente pour vous ?
Valentin L’ARS Nouvelle-Aquitaine est une des ARS en France qui soutient la réduction des risques en milieux festifs. Et ça c’est très plaisant parce qu’à chaque rencontre, on sent qu’ils croient en notre action. Ce projet pour nous, c’est l’opportunité de démontrer l’efficacité de la RdR en milieux festifs en Nouvelle-Aquitaine et la pertinence de faire perdurer une telle coopération régionale, inédite sur le territoire !
Tom Oui, nous sommes vraiment heureux que l’ARS Nouvelle-Aquitaine prenne en compte la RdR en milieux festifs et le montre en finançant ce projet. Nous savons que des structures d’autres régions n’ont pas cette opportunité. Nous allons tout faire pour que ce projet fonctionne, en espérant qu’il puisse être pérennisé par la suite.