Journée mondiale de la santé mentale : en France, les réponses se font attendre !
Nous constatons une augmentation des besoins en santé mentale liée à l’épidémie de Covid-19 et au confinement, qui ont provoqué des ruptures dans les parcours de soins, et une dégradation générale de la santé mentale de la population. Face à une offre notoirement insuffisante et dégradée avant la crise, nous observons des retards dans les prises en charge, des difficultés d’accès aux soins, la réapparition de troubles psychiques chez des personnes stabilisées, avec des situations dites de décompensation, et l’apparition de symptômes dans des populations fragilisées. Ces situations touchent particulièrement les personnes rendues encore plus vulnérables par le contexte social et sanitaire (maladie, isolement, précarité, addictions, personnes sans logement ou hébergées, personnes en situation de migration, jeunes relevant du handicap ou de la protection de l’enfance).
Dans ce contexte, les attentes sont fortes vis-à-vis des moyens alloués à travers le Ségur de la Santé et le projet de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2021. La mesure 31 du Ségur de la Santé, qui prévoit 40 millions d’euros pour « renforcer l’offre de soutien psychiatrique et psychologique de la population » reste à préciser. Elle est à mettre en regard des besoins de la psychiatrie et pédopsychiatrie identifiés dans la feuille de route ministérielle et non chiffrés. Cette enveloppe oublie la vétusté de nombre d’établissements, la sur-occupation des lits, les délais d’accès aux CMP et CMPP ainsi que le déficit de dispositifs médico-sociaux. Une concertation des acteurs sur la mise en œuvre et le fléchage de ces crédits est primordiale.
La crise a interrompu des chantiers de la feuille de route ministérielle qu’il est important de finaliser et de concrétiser : c’est tout l’enjeu de la mise en œuvre des projets territoriaux de santé mentale en 2021. Les PTSM ont permis aux acteurs d’identifier les besoins et les réponses à apporter sur le territoire. C’est au travers des moyens alloués pour leur mise en œuvre effective que se dessinera ou non la volonté des pouvoirs publics de modifier profondément le paysage de la psychiatrie et de la santé mentale. Nous sommes en attente des contractualisations avec les agences régionales de santé. Des postes de coordination seront nécessaires pour maintenir les dynamiques de décloisonnement et de coopération entre les acteurs sociaux, médico-sociaux, sanitaires, les personnes en situation de souffrance psychique et leur entourage.
Nous regrettons que les soins sans consentement et, en particulier, les placements en isolement et en contention, condamnés de longue date par la Cour européenne des droits de l’homme comme des privations inacceptables de liberté et des mesures attentatoires à la dignité des personnes, soient toujours pratiqués de façon excessive en France, davantage que dans la plupart des pays européens, et soient peu encadrés. Ils sont même en augmentation depuis quelques années, avec des pratiques très disparates en fonction des établissements de santé et des services, ainsi que l’a relevé le Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Ces pratiques, définies par la loi comme des mesures d’usage exceptionnel, doivent être mieux tracées et contrôlées par l’autorité judiciaire, tel que l’a indiqué le Conseil constitutionnel dans sa décision du 19 juin 2020, afin de respecter les droits fondamentaux inscrits dans la Constitution. L’Observatoire des droits de l’usager de la psychiatrie et les commissions départementales des soins psychiatriques doivent avoir toutes leur place dans le suivi et le contrôle de ces mesures. Le changement des pratiques ne pourra intervenir que par une coopération de tous les acteurs : professionnels de la psychiatrie, de la justice, ainsi que représentants des personnes concernées et des familles. Cette réflexion doit poser les bases de nouvelles pratiques – basées sur les formations, l’accompagnement des équipes, le renforcement des moyens humains et la prévention des situations de crise – pour en faire de réelles mesures d’exception.
Les chiffres du baromètre Unafam montrent qu’il est urgent de déployer des moyens importants afin que l’offre sociale et médico-sociale réponde aux besoins des personnes. Soins et accompagnements doivent être pensés conjointement afin de limiter les parcours chaotiques et l’épuisement des aidants. Ce changement de paradigme doit s’accompagner du développement d’équipes mobiles et de dispositifs de logements accompagnés sur l’ensemble du territoire.
Nos fédérations et associations attendent des mesures et des moyens permettant de répondre aux enjeux et besoins. La santé mentale et la psychiatrie doivent faire partie des priorités des suites du Ségur de la Santé et du Ségur de la santé publique annoncé par le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran.
Nous réaffirmons notre souhait de pouvoir contribuer à la construction de ces politiques publiques.
Contacts presse
Uniopss : Valérie Mercadal, directrice de la communication – vmercadal@uniopss.asso.fr – 01 53 36 35 06
Fédération des acteurs de la solidarité : Audrey-Jane Baldi, responsable du service communication – audrey-jane.baldi@federationsolidarite.org, – 01 48 01 82 06
Unafam : Guillaume Faucher – guillaume.faucher@agenceproches.com – 06 99 44 92 60
Fédération Addiction : Olivier Hurel, chargé de communication – o.hurel@federationaddiction.fr
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