De réels succès de la prévention des addictions en France ! Amplifions la dynamique !
« Même dans la période troublée que nous traversons, il peut arriver qu’une bonne nouvelle n’arrive pas seule. C’est ainsi que les résultats récents de différentes enquêtes épidémiologiques mettent en évidence de réels progrès de la prévention des addictions dans notre pays. »
Le récent numéro du Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) publié à l’occasion de la Journée mondiale sans tabac du 31 mai, confirme la tendance à la baisse des consommations de tabac en France. Les données, issues en partie du Baromètre de Santé Publique France, indiquent que la prévalence de la consommation estimée en 2019, continue de diminuer même si c’est à un rythme un peu moins vif que ces dernières années. Cependant avec 30,4 % de fumeurs (24 % de fumeurs quotidiens), c’est la prévalence la plus basse jamais atteinte dans notre pays ! Toutefois, cette diminution de 1,4 points ne se retrouve pas cette année chez les plus fragiles (non diplômés, chômeurs). Cela rappelle que la prévention s’inscrit dans la durée et nécessite des interventions ciblées, convergentes et coordonnées, agissant aussi bien sur l’offre (paquet neutre, interdiction de publicité, des arômes…), l’accès aux produits (politique de prix, interdiction de vente aux mineurs…), que sur l’accompagnement de proximité pour l’aide à l’arrêt (remboursement de la substitution nicotinique, Moi(s) sans tabac… ) et le vapotage. Cela doit nous rappeler également que, plus la prévalence générale baisse, plus la dépendance au tabac va se concentrer dans des populations vulnérables, nécessitant le renforcement d’un accompagnement global par les structures spécialisées (notamment de proximité comme les CSAPA[2]).
D’autre part, les résultats de l’enquête internationale « Health Behaviour in School-aged Children » (HBSC) et EnCLASS France 2018 menée en Europe et au Canada et présentés récemment par l’OFDT témoignent aussi d’excellents résultats en France en ce qui concerne les usages de tabac, d’alcool et de cannabis parmi les adolescents âgés de 11, 13 et 15 ans. Depuis 10 ans maintenant, ils sont clairement orientés à la baisse. Les taux d’adolescents ayant expérimenté le tabac à l’âge de 15 ans sont ainsi passés de 55,5 % en 2010 à 33 % en 2018 mais aussi de 28 % en 2010 à 16,5 % en 2018 pour le cannabis. Les jeunes Français ne sont plus les « champions » d’Europe de l’expérimentation ou des usages de cannabis. Ils sont devancés par bien d’autres pays (Bulgarie, Canada, Italie, Suisse, Grande Bretagne, Pays-Bas…) et se rapprochent de la moyenne HBSC. De même, les taux d’expérimentation d’alcool à 11 ans sont passés de 57,7 % en 2010 à 32,1 % en 2018. S’ils nous maintiennent toujours au premier rang des expérimentations à cet âge, en revanche les jeunes Français sont parmi les moins nombreux à avoir présenté au moins deux ivresses à 15 ans. La prévalence des ivresses a baissé de 17,1 % en 2014 à 12,9 % en 2018, les plaçant dans le dernier quart du classement. Usages expérimentaux d’alcool et ivresses répétées n’obéissent pas aux mêmes déterminants sociaux, culturels ou psychologiques…
Ces évolutions positives et convergentes, quels que soient les produits, sont essentiellement dues à des évolutions sociétales où la prise de conscience des risques, par les adultes mais aussi par les jeunes, conduit à une meilleure maîtrise. Les campagnes de prévention ont évolué. En utilisant les ressources du marketing social , ni diabolisantes, ni culpabilisantes, mais « dénormalisant » les usages addictifs et leurs risques , elles ont amplifié ce mouvement. Par ailleurs les actions de prévention fondées sur le renforcement des compétences psycho-sociales des jeunes scolarisés avec le soutien de SPF (Santé Publique France), du Fonds Addictions et de plusieurs ARS (Agences Régionales de Santé), ainsi que l’action volontariste d’intervention précoce des Consultations Jeunes Consommateurs (CJC) auprès des usagers et de leurs familles, ont évidemment contribué à construire cette culture partagée de réduction des risques dès le plus jeune âge.
La seule grande surprise finalement, c’est le peu d’écho donné à ces bonnes nouvelles. Peut-être les « pro-drogues » ou les résignés sont-ils surpris de cette tendance qui contrarie ce qu’ils pensaient être le développement inéluctable des addictions, peut-être que, de leur côté, les « antidrogues » craignent-ils à l’inverse que ces bons résultats ne démobilisent les foules…
Pour notre part, nous ne pouvons qu’apprécier ces résultats et en féliciter les acteurs, jeunes ou adultes, ainsi que tous les professionnels qui ont pu y contribuer.
Au moment où les actions de prévention sont impactées par la crise COVID 19, où leurs réalisations pourraient être mises à mal par des arbitrages financiers et le choix de nouvelles priorités, voire la tentation au renoncement à une politique d’investissement dans les programmes probants, regardons les premiers résultats de nos efforts conjoints !
Cela devrait être justement un puissant encouragement à aller plus loin encore !
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