Communiqué de presse sur la loi de santé : de la prévention à la réduction des risques
Les grands enjeux de la Loi de Santé croisent ceux de la lutte contre les addictions : inégalités sociales et territoriales de santé, parcours de soin, décloisonnement des pratiques, renforcement du préventif sur le curatif, adaptation de l’offre aux besoins, transdisciplinarité, public jeunes…
Les pratiques addictives concernent des millions d’usagers et causent des milliers de décès chaque année : ces nouvelles orientations laissent espérer une stratégie enfin adaptée à l’environnement addictogène de ce début de XXIème siècle. C’est pourquoi les professionnels de notre réseau partagent une volonté commune d’améliorer le projet de loi par des propositions concrètes.
Prévention des addictions : « Passer du curatif au préventif » – Quelles mesures ?
La MILDECA*, le Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes se sont engagés ensemble pour les publics jeunes en relançant les Consultations Jeunes Consommateurs (CJC) et ont lancé, en lien avec l’INPES*, une campagne de communication auprès du grand public et des professionnels de santé : Spots télés, radios, affiches cherchent à sensibiliser les parents et l’entourage sur les consommations et les pratiques addictives.
La loi de santé ouvre l’opportunité de structurer une politique de prévention, optimisant les dispositifs créés par les pouvoirs publics en associant étroitement l’intervention dans les CJC avec des actions de prévention collectives en amont . Prévenir les addictions, c’est « aller vers » et « faire avec » :
– « Aller vers » les publics concernés et d’abord les enfants, adolescents et jeunes adultes mais aussi les parents et l’entourage des jeunes ;
– « Faire avec » les autres acteurs du territoire pour être plus efficaces et plus efficients, ensemble.
Les équipes transdisciplinaires des Centres de Soin d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie (CSAPA) doivent déployer leurs actions au-delà des seuls lieux de soins et sans attendre les publics qu’ils ne pourront rencontrer que dans leurs lieux de vie. Il est admis que plus tôt se fait la rencontre éducative, meilleure est la protection apportée aux enfants et jeunes gens en matière de conduites addictives avec ou sans drogue (jeux, abus d’écran).
Les CSAPA, porteurs de compétences spécialisées, doivent apporter un continuum d’intervention allant de la prévention à l’intervention précoce et aux soins. Ce continuum s’organise en lien avec les acteurs de premier recours (ex : médecins de ville, éducation nationale etc.) et avec les autres acteurs de la prévention, en favorisant la participation des personnes concernées.
La prévention est actuellement une mission facultative financée de façon aléatoire et sur appel à projets. Nous proposons qu’elle soit reconnue en tant que mission obligatoire au même titre que les autres missions, afin de développer cette approche dans la durée et la proximité. Nous demandons son financement pérenne afin d’éviter les ruptures d’action qui sont une source de gabegie insupportable en période de crise financière et budgétaire.
Cette demande se situe en cohérence avec le rapport Cordier qui précise la nécessité de coordonner les politiques publiques et de réunir leur financement en matière de prévention. Elle est aussi en adéquation avec une récente mission IGAS qui soulignait l’importance de définir des priorités et des modalités de simplification en s’appuyant sur les Centres de Soin d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie :
« La mission estime toutefois nécessaire de prioriser l’action publique et de cibler le public jeune. Pour prendre en compte le continuum des actions et la nécessité d’intervenir très en amont, il est recommandé de rendre obligatoire une mission de prévention collective auprès des jeunes pour les CSAPA assurant une Consultation Jeunes Consommateurs.»
Réduction des Risques : reconnaître et sécuriser cette démarche de santé
Après l’inscription de la Réduction Des Risques (RDR) dans la loi de santé de 2004 avec le référentiel et la reconnaissance des CAARUD, la loi de 2015 organise son déploiement. La Fédération Addiction, avec d’autres acteurs de la Réduction des Risques porte un plaidoyer commun pour expliciter et défendre la RDR, son nécessaire appui sur des outils et une expertise partagée entre professionnels et usagers.
La généralisation du dépistage et des Tests Rapides à Orientation Diagnostique (TROD) pour le VHC, l’extension de la RDR au milieu carcéral, le cadre pour l’expérimentation des salles de consommation à moindre risque (SCMR), sont des avancées importantes dans la loi.
10 ans après la mise en place de la RDR et alors que de nombreux rapports scientifiques montrent son utilité, elle ne doit plus être associée à une incitation à l’usage.
En plus d’être une réponse à telle ou telle épidémie ou maladie transmissible, la RDR est un mode d’intervention en direction des usagers et de leurs entourages, face à une évolution des modes de vies. Chaque action est positionnée au regard des besoins et des possibilités de la personne et de ses compétences pour agir favorablement sur sa santé par des stratégies adaptées à ses pratiques de consommation et à son mode de vie, et en atténuer les effets sur l’environnement :
• aux différents modes de consommation et aux différents produits (illicites mais aussi licites et sans substance)
• et à la diversité des publics concernés : des exclus économiques aux personnes intégrées, aux groupes marginaux…
Les signataires du plaidoyer souhaitent que la définition de la RDR englobe l’ensemble de ces déclinaisons et que les professionnels intervenant dans l’accompagnement au quotidien des populations concernées soient reconnus et sécurisés dans leur mission de RDR.
Sans laxisme ni laisser faire, l’enjeu de la loi est d’apporter une réponse de santé publique allant de la prévention à la réduction des risques.
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